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Cantique des Cantiques
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Retraite sur le Cantique des Cantiques par Christian de Chergé, prieur des moines de Tibhirine Recension Commencer Recension du livre de Christian Salenson, éd. : "Retraite sur le Cantique des Cantiques par Christian de Chergé, prieur des moines de Tibhirine", par Françoise Laurent
Christian Salenson, éd. Comme un sceau apposé sur ce texte, la vie de Christian de Chergé et de ses frères offerte jusqu’à l’extrême donne une vibration unique à ces mots qui méditent le Cantique des Cantiques. Le propos est empreint d’histoire et de temporalité : le temps de la retraite prêchée aux Petites Sœurs de Jésus au Maroc dans le contexte des relations avec l’Islam (1990), celui des propositions de méditation de C. Salenson lors d’une retraite (2012) et de l’édition avec ses introductions, références (2013), le temps de l’épreuve, 1996, et puis notre aujourd’hui. Le texte est actuel, vivant, qui reprend sept paroles du Bien-aimé et de la Bien-aimée avec parfois des options quant au sujet de l’impératif (« qu’il me baise d’un baiser de sa bouche, attire-moi, lève-toi… Viens t’en, Reviens, Ouvre-moi, Reviens, reviens, Pose-moi comme un sceau sur ton cœur ») et six fois, plus brièvement, une lettre aux églises du livre de l’Apocalypse, manifestant l’unité de l’Écriture. En chaque entretien ainsi ouvert se conjuguent l’approche biblique pétrie de lectio divina et d’exégèse, celle, spirituelle, pour la vie du cœur, la prière, les vœux religieux, l’approche ecclésiale et missionnaire des liens interreligieux et de la dimension d’universalité, la perspective anthropologique à laquelle le Cantique invite tant et qui rejoint le quotidien des destinataires, le service, la place des femmes. L’ouvrage ne se laisse pas résumer car il appelle à la lecture, à la méditation personnelle qui, du premier cri entraine dans le dynamisme de la relation lequel au final réalise ce « baiser » initialement désiré. Mais des points forts l’animent. C’est une constante du regard de l’auteur : le commencement est toujours dans le Mystère trinitaire où l’homme dans le Fils est présent, « lève-toi » se pense à partir de la Résurrection, le chemin est mouvement en avant porté par la fin déjà réalisée de la relation et du regard du Bien-aimé d’où la Bien-aimée se reçoit. Mais, et c’est capital, la relation du Cantique est à voir dans la perspective de la mission universelle de l’Église et de la vie communautaire : attention est portée au vocabulaire de la fraternité où s’accomplissent les formes de l’amour. L’ouverture vers autrui dont la Visitation est comme le paradigme, est fruit de l’attirance, se donner mutuellement d’exister dans le besoin réciproque du visage de l’autre tisse la vie fraternelle, là encore à partir de l’Incarnation où « Dieu est entré en fraternité ». Ce texte est précieux, à lire, à relire. Son accès est aisé, soutenu par l’édition soignée et pédagogique de C. Salenson qui l’actualise, l’inscrit dans un contexte, des circonstances. De façon formelle, il introduit des sous-titres, unifie sa structure, varie la typographie. Plus profondément, il offre des points de réflexion, retient des phrases majeures, évoque l’existence concrète. Comme couronné par la belle reproduction de Marc Chagall en couverture, ce livre nourrit l’intelligence et le coeur. |